La question de la friandise en éducation canine suscite de nombreux débats sur les réseaux sociaux et dans les articles de blog. Souvent, on entend des affirmations comme : “la méthode à la friandise ne fonctionne pas” ou “la méthode à la friandise n’est pas adaptée à tous les chiens”.
Effectivement, la “méthode friandise” ne fonctionne pas ! Tout simplement, car la friandise n’est pas une méthode. Toutes ces phrases démontrent une méconnaissance des processus d’apprentissage. La friandise est un outil utilisé dans le cadre de méthodes éducatives.

Qu’est-ce qu’une méthode ?
Le terme méthode vient du grec “methodos”, signifiant “qui suit un chemin”. Une méthode se définit alors comme un “ensemble ordonné de manière logique de principes, de règles, d’étapes, qui constitue un moyen pour parvenir à un résultat” (Larousse).
Ainsi, toute méthode repose sur une organisation cohérente et logique d’étapes de réalisations pour aboutir à un objectif fixé. Pour chacune de ces étapes, les moyens d’y arriver sont définis. Dans un cadre éducatif, les moyens sont les règles et procédures qui vont être utilisées pour faciliter l’apprentissage et le rendre effectif.
Prenons l’exemple de l’apprentissage de la lecture. Nous commençons par apprendre l’alphabet, puis les syllabes, ensuite les mots et leurs significations, et enfin les phrases et leur agencement. Ce sont les étapes. Les enseignants vont ensuite utiliser des méthodes pédagogiques pour réaliser chacune de ces étapes. Le choix de ces méthodes est dépendant de l’approche qu’ils vont utiliser pour transmettre les connaissances. Et pour chacune des séquences d’apprentissage, ils vont déterminer les techniques et outils dont ils auront besoin pour mettre en œuvre cette méthode.

Une méthode est donc une manière de faire qui s’inscrit dans une approche globale et qui va inclure à la fois des techniques et des outils.
La friandise ne rentre pas dans cette définition, ce n’est pas une méthode.
Méthodes et éducation
Dans l’éducation des chiens, l’objectif est de faciliter l’intégration de l’animal en société humaine. Les méthodes éducatives peuvent varier considérablement et s’inscrivent dans des approches multiples (soumettre l’animal à l’obéissance, rester le dominant de la meute, accompagner le chien dans son intégration, respecter les émotions de l’animal, devenir son meilleur ami, etc.). Il ne s’agit pas ici d’évaluer d’un point de vue efficacité ou d’un point de vue éthique ces différentes approches.
Ces approches reflètent notre conception du chien et de sa manière d’appréhender le monde, influencées par nos connaissances et notre personnalité. Dans chacune d’elle, vont donc être préconisé un certain nombre d’actions pour optimiser cette intégration du chien dans sa famille. Ces approches vont déterminer le choix des méthodes, des techniques et des outils.
Pour illustrer ces notions, nous allons nous focaliser sur une de ces actions : la manière dont il est possible d’apprendre à un chien un comportement. L’objectif est alors que l’animal produise ce comportement dans une situation donnée et/ou à la prononciation d’un mot (appelé généralement un ordre). Les méthodes utilisées pour renforcer ce comportement reposent sur la motivation de l’animal à obtenir ou à éviter.
Les méthodes qui reposent sur la motivation de l’animal à obtenir vont alors utiliser des techniques et des outils qui vont encourager l’animal à produire le comportement dans l’objectif d’obtenir une conséquence agréable.
À l’inverse, les méthodes qui reposent sur la motivation de l’animal à éviter vont alors utiliser des techniques et des outils qui vont pousser l’animal à produire le comportement dans l’objectif de se soustraire à une situation désagréable.

Illustrons cela avec un exemple. Pour apprendre à un chien à s’assoir, il existe plusieurs possibilités, en voici deux :
- Je peux utiliser une friandise pour mettre le chien en position assise en bougeant la main qui tient la friandise afin de guider le corps du chien dans la bonne position. Une fois en position, le chien obtient la friandise. Ici, j’utilise une méthode qui repose sur la motivation de l’animal à obtenir, avec une technique : le leurre, et un outil : la friandise. A force de répétition, l’animal va reproduire le comportement pour obtenir quelque chose d’agréable.
- Je peux appuyer sur l’arrière-train du chien tout en tirant vers le haut sur la laisse ou le collier afin d’obtenir le basculement du corps du chien dans la position voulue. Une fois en position, la traction est relâchée. Ici, j’utilise une méthode qui repose sur la motivation de l’animal à éviter, avec une technique : la contrainte, et un outil : le collier. A force de répétition, l’animal va reproduire le comportement pour éviter une situation désagréable, voir douloureuse.
Cet exemple, n’a pas pour objectif d’être exhaustif, mais illustratif, et d’autres combinaisons de techniques et d’outils sont bien sûr possibles.
La friandise comme outil de travail
En éducation du chien compagnon, la friandise a deux usages principaux.
Le premier, est celui que nous venons de citer : renforcer un comportement souhaité pour augmenter sa probabilité d’apparition. Mais ce n’est pas suffisant ! Combien de personnes disent “oui, mais quand il n’y a pas la friandise, il ne le fait pas”. Et c’est normal ! La friandise est un outil qui doit être utilisé dans le cadre d’un programme éducatif construit afin de permettre un apprentissage graduel vers l’atteinte de l’objectif. Pour atteindre l’objectif, il faut qu’il soit clairement défini. Par exemple : “s’assoir au mot assis dans toutes les situations sans la présence de friandise”. C’est à partir de cet objectif que nous allons pouvoir découper le programme en étapes réalisables. Ces étapes doivent permettre un apprentissage graduel avec des niveaux successifs de difficultés.
Le deuxième usage est l’association avec un objet ou un événement de l’environnement qui pose un problème à l’animal. L’objectif ici est de changer l’état émotionnel de l’animal, ce qui implique un programme précis et une évaluation systématique de l’état de l’animal.
La friandise pour détourner l’attention du chien n’est pas une solution éducative : le chien n’apprend pas à se comporter différemment. Ce n’est pas une solution durable. Cest une solution provisoire parfois utile, dans des situations bien précises quand il n’est pas possible de faire autrement et toujours dans le cadre d’un programme global. La friandise n’est pas non plus un outil de manipulation ou une monnaie d’échange.
Un des avantages de la friandise, en particulier dans des programmes de rééducation, est d’aider à l’évaluation de l’état émotionnel et motivationnel de l’animal. Etant liée à un besoin primaire, elle est universelle. Si le chien refuse la friandise, c’est qu’il y a une raison ! C’est à nous de trouver la raison, afin d’adapter le programme.

Conclusion
En résumé, la friandise est un outil, non une méthode. L’évaluation de l’efficacité se fait sur la méthode employée et la manière d’utiliser l’outil, mais pas sur l’outil lui-même. Cet outil s’inscrit dans des programmes d’éducation ou de ré-éducation, c’est-à-dire des plans d’action afin d’atteindre un objectif défini. Ces programmes sont composés d’étapes, de techniques et d’outils.
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