Ingérer les excréments, la coprophagie, est un phénomène répandu dans le règne animal.1
En connaitre les origines permet d’adapter le traitement.
On distingue la coprophagie interspécifique et la coprophagie intraspécifique.
Chez les chiens la coprophagie interspécifique, manger les crottes d’autres animaux comme les chats, rongeurs, ongulés et humains n’est pas considérée comme pathologique. Néanmoins, elle peut causer des problèmes de santé si les excréments ingérés contiennent des parasites.
La coprophagie intraspécifique
La coprophagie intraspécifique, consiste à manger les excréments des autres chiens, ou ses propres excréments.
Dans une étude sur la coprophagie intraspécifique publiée en 20182, les chercheurs encadrés par le Dr Benjamin Hart, de l’université Davis en Californie, ont trouvé que :
- 16% de chiens sont classés comme des « sérieux » mangeurs de crottes. Ils ont été « pris en flagrant délit » au moins 6 fois.
- 24% de chiens ont été observés en train de manger des excréments au moins 1 fois.
- 85% de chiens coprophages ne mangeaient pas leurs propres crottes
Une étude pilote sur les facteurs de risque de la coprophagie chez le chien, datant de 2006 et conduite à l’université de Wageningen (Pays-Bas) 3, indique que presque la moitié des chiens (231 sur 5174) de race et de classe d’âge différentes, étaient coprophage. Seulement 25,5% des chiens coprophages, mangeaient des crottes de chiens (intraspécifique). Plus de la moitié de ces chiens (55,9%) mangeaient uniquement les crottes des autres chiens, alors que 37,3% mangeaient uniquement leurs propres crottes. 6,8% mangeaient leurs propres crottes et celles des autres chiens.
Les résultats de l’étude montrent que le sexe du chien n’avait pas d’influence sur la consommation de crottes de chien.
Cependant les chiens stérilisés mangeaient davantage de crottes que les chiens entiers.
Des chiens « gourmands », mangeant comme des gloutons, étaient plus coprophages que les chiens mangeant plus lentement.
Les races de retrievers étaient également plus coprophages que les autres races de chien.
Les chiens chassant les ombres et leurs queues mangeaient davantage de crottes de chiens que les autres.
Les auteurs concluent qu’une recherche plus importante serait utile afin d’en apprendre davantage sur la prévalence et les facteurs de risque de la coprophagie. Plus d’informations sont nécessaires sur le début de la coprophagie, l’âge du chien, le lieu d’achat du chien et le régime alimentaire afin d’aider les propriétaires à prévenir, contrôler ou résoudre ce comportement non-désiré.
La coprophagie et les mamans chiennes
La maman chienne, lors de la période néonatale de ses chiots, leur toilette la région périnéale, en léchant et en avalant les selles et les urines. Ce comportement laisse l’endroit de repos propre et diminue le risque des maladies, mais élimine également les odeurs pouvant attirer les prédateurs. Ce réflexe de la mère disparaît vers l’âge de 3 à 4 semaines des chiots.5
En grandissant, les chiots explorent leur environnement. Ils reniflent pour connaître les odeurs et ils prennent des objets en gueule pour en découvrir la texture et le goût.
Ils peuvent ingérer les excréments. Dans la plupart des cas ce comportement disparaît avant l’âge de 9 mois.6 Ce n’est pas considéré comme pathologique.
Que faire quand votre chien mange des excréments ?
Les raisons médicales
Quand vous constatez que votre chien mange des crottes, une visite chez votre vétérinaire s’impose, afin d’éliminer en premier les raisons médicales. Vous faciliterez le travail du vétérinaire en lui donnant les informations suivantes :
- la fréquence du comportement,
- le ou les endroit(s) où vous l’avez constaté,
- le genre d’excréments : ses propres crottes, les crottes d’autres chiens ou des excréments d’autres animaux,
- les conséquences : votre chien est malade (diarrhée, etc.) ou pas.
Votre vétérinaire pourra par la suite chercher les raisons médicales éventuelles :
- les parasites
- régime alimentaire déficient
- syndrome de malabsorption
- les maladies qui peuvent augmenter l’appétit comme le diabète, la maladie de Cushing, thyroïde, …
- la prise de médicaments comprenant des stéroïdes
- …
Le régime alimentaire et la coprophagie
L’étude sur le paradoxe de la coprophagie intraspécifique7 indique que pour les sujets étudiés, aucune preuve n’a été trouvée pour relier la coprophagie au régime alimentaire ou à l’âge des chiens.
La grande majorité des chiens était nourri aux croquettes. Dès lors, une possible relation entre le régime alimentaire et la coprophagie était impossible à relever à cause justement du manque de variété de différents régimes alimentaires.8
Les chiens coprophages, sujets de l’étude, étaient éduqués à la propreté (faire ses besoins à l’extérieur de la maison), aussi facilement que les chiens non-coprophages, ce qui suggère une aversion normale aux excréments.
La coprophagie concernait massivement des excréments de moins de 2 jours (92%). L’hypothèse émise, indique que la coprophagie reflète une tendance héritée du loup ancestral, à garder la zone de la tanière libre de parasites intestinaux, venant des excréments. Les excréments déposés dans cette zone contenant des ovules parasitaires, initialement non infectieux, pourraient développer des larves infectieuses après 2 jours. Cette stratégie défensive qui a évolué contre les parasites serait adaptative.9
Prof.Dr.Ir. Anton Beynen10, spécialiste de la nutrition animale, indique dans son article Diet and canine coprophagy, 2020 11, que des théories sans fondement prétendent que le régime alimentaire affecte la coprophagie canine. Un apport élevé en glucides (amidon), un apport insuffisant en vitamine B1 (thiamine), des régimes avec une digestibilité inférieure à la moyenne et des régimes pauvres en fibres ont tous été indiqués comme favorisant la coprophagie. Il n’y a pas de données de recherche disponibles soutenant ces théories.
En parlant de régime alimentaire, on peut non seulement considérer la qualité mais également la quantité. En 1995 la recherche concernant les effets de restriction calorique sur les comportements de chien enfermés dans des enclos, n’a pas permis de constater de modification du comportement de coprophagie.12
Des compléments alimentaires divers, sous formes différentes, sont commercialisés comme dissuasifs contre l’auto-coprophagie (les chiens qui mangent leurs propres excréments).
Plusieurs suppléments contiennent de la thiamine et des enzymes digestives, y compris l’alphamylase qui décompose l’amidon. La plupart des produits contiennent des substances qui rendraient les selles moins attrayantes pour les chiens.
Une substance couramment utilisée dans les moyens de dissuasion de la coprophagie est un extrait de la plante du désert Yucca schidigera.
Le professeur Beynen conclut (2020)13, qu’il n’existe aucune preuve, sous forme de résultats d’études contrôlées, qui montre qu’un changement de régime alimentaire ou un complément alimentaire dissuasif, diminue considérablement la coprophagie canine.
En soi, dit-il, le principe de rendre les excréments répulsifs par un constituant ou un complément alimentaire sûr, semble réalisable.
L’application serait principalement dirigée vers l’auto-coprophagie.
Est-ce que les propriétaires de chiens coprophages ont le temps ou l’envie d’attendre ces résultats d’études contrôlées ?
S’ils veulent modifier ce comportement de coprophagie de leur chien, aujourd’hui, pas dans 5 ans ou plus, ils peuvent s’adresser à leur vétérinaire pour évaluer ensemble si un changement de régime alimentaire ou l’ajout d’un complément alimentaire est envisageable avec l’espoir d’une amélioration de la situation.
Les raisons comportementales
Après avoir écarté ou traité les raisons médicales, nous pouvons considérer le composant comportemental de la coprophagie.
Durée d’enfermement
Est-ce que la durée d’enfermement favorise la coprophagie ?
Pour le bien-être des animaux de laboratoire il est important d’enrichir leur environnement. On peut se poser la question de savoir si l’ennui et le manque de liberté de mouvements ont un effet sur la coprophagie.
Une étude publiée en 2019 dans le Journal of Applied Animal Welfare Science14 a décrit l’effet de la corne de veau, objet à mâcher bénéfique à plusieurs égards, sur les comportements de 62 chiens de laboratoire. En ce qui concerne le comportement qui nous intéresse, la coprophagie, on ne note aucune différence entre les jours où les chiens mâchaient de la corne de veau et les jours où ils n’en mâchaient pas.
Comment ça se passe pour nos chiens qui vivent avec nous ?
Depuis le premier confinement (COVID 19) en 2020 nous comprenons mieux les difficultés (stress, anxiété, ennui) liées aux restrictions des déplacements.
Si vous enfermez votre chien dans une petite espace (pour des raisons x, y et z) faites-le pour une durée adaptée au chien. Evitez de prendre le risque que par ennui, stress ou anxiété il avale ses excréments.
Crottes appétissantes
Dans certains cas les excréments peuvent contenir des nutriments peu ou pas digérés comme de la matière grasse, des fibres musculaires et/ou de l’amidon et restent « appétissants ». Il est donc important de pouvoir anticiper et empêcher le chien d’ingérer la crotte, car quand on aime un plat, on a tendance à en remanger.
Restez vigilant lors de vos balades et essayez de voir les crottes avant votre chien. Redirigez-le sur un autre comportement. Rappelez-le. Cela l’éloignera de la crotte et de la tentation de la manger. Récompensez votre chien en arrivant pour maintenir un bon rappel. N’oubliez pas que votre chien doit choisir de venir vers vous au lieu de manger la crotte : ce choix n’est pas toujours facile !
Ne laissez pas trainer les excréments de vos chiens, ramassez-les immédiatement.
Foyers multi-chiens
L’étude sur le paradoxe de la coprophagie chez le chien a révélé que le comportement était plus souvent constaté dans les foyers multi-chiens. 15
Il arrive qu’un chien en bonne santé vivant avec un vieux chien mange les crottes du vieux chien, surtout dans des situations d’incontinence fécale. Cela pourrait être lié à l’instinct de protéger le groupe contre les prédateurs.16
Les personnes vivant avec plusieurs chiens, ont intérêt à surveiller davantage encore, les endroits d’élimination des chiens et de ramasser les excréments sans tarder.
Est-ce qu’il faut éviter de ramasser les excréments devant les chiens ? Si vous enlevez les crottes, devant votre chien, sans attirer son attention, comme pour toutes les autres tâches ménagères, vous n’encouragez pas la coprophagie.
Attirer l’attention
Quand votre chien avale une crotte et que vous intervenez en vous précipitant sur lui, vous risquez de lui apprendre que manger des excréments attire votre attention. Il pourrait par la suite répéter l’action avec le but que vous vous occupiez de lui.
Que faire alors ? Rappelez votre chien avant qu’il arrive à la crotte, ou avant qu’il la prenne en gueule. Observez-le bien et essayer d’anticiper au lieu d’intervenir sur le fait. Rappelez-vous, il vaut mieux prévenir que guérir ! Revenir vers vous est un comportement qui s’apprend et s’entretient.
S’il est trop tard pour « prévenir », deux options s’offrent à vous : ignorer votre chien, car de toute façon il profite déjà de sa « délicatesse » et le mal est fait, ou lui demander calmement de donner la crotte. Quand vous avez enseigné les comportements d’ouvrir sa gueule et de laisser tomber l’objet dedans sur signal dans des contextes différents (sans crottes !) et vous l’avez bien renforcé (récompensé), il est possible qu’il vous « offre » la crotte.
Le flagrant délit
Certains chiens pris « en flagrant délit » de déféquer à l’intérieur, ayant subi une réaction désagréable de votre part (crier, mettre le nez dedans), peuvent éviter cette réaction ultérieurement en avalant leurs excréments ou en se cachant pour déféquer, derrière un meuble, une porte, etc.
Le « non » ferme et autres punitions, au moment où votre chien fait ses besoins, comportent des risques. Réfléchissez plutôt à comment aider votre chien à déféquer à l’extérieur, en maintenant un rythme régulier des sorties, à des endroits assez calmes et agréables pour que votre chien puisse se détendre pour aller aux toilettes.
Expériences/apprentissages du passé
Certains chiens dont on a précédemment enlevé des objets de la gueule, en les forçant, pourraient également faire de la coprophagie.
Il arrive que les propriétaires de chiens enlèvent des objets de la gueule du chien, en tenant la gueule ou en tirant sur l’objet. Exemple : le chien a volé une chaussure ou de la nourriture et l’humain rattrape le chien et le force à lâcher l’objet.
Que peut retenir le chien de cette expérience ?
1/ pour ne pas se faire attraper il peut partir avec l’objet en courant
2/ s’il ne veut pas rendre l’objet il peut l’avaler.
3/ il peut montrer des comportements d’agressivité pour que la personne ne s’approche pas
4/ il peut faire une combinaison des 3 solutions précédentes
Il est donc fortement conseillé d’apprendre à son chien à donner volontairement les objets tenus en gueule. Procéder par le troc est très efficace. Démarrez l’apprentissage avec des objets de faible valeur. Votre chien lâchera l’objet volontairement si le troc est valable pour lui, si l’objet ou l’action en échange en vaut la peine (objet identique ou d’une valeur plus élevée, jeux et autres actions fortement appréciées). Répétez ce comportement facile, fréquemment. Par la suite, vous augmentez progressivement la valeur des objets (jouets, nourriture) à rendre. Cet exercice répété régulièrement, augmentera les réponses favorables à votre demande à « donner » (ou laisser tomber) la crotte.
Chiens voleurs de nourriture
Les chiens « gourmands », ceux qui volaient de la nourriture de la table, selon l’étude du paradoxe de la coprophagie canine, tendaient vers la coprophagie.17 L’étude n’indique pas s’il s’agit d’une simple corrélation ou d’une conséquence d’avoir forcé le chien à rendre des objets « volés ».
Arrêter et prévenir la coprophagie
Récapitulons :
- En cas de coprophagie, prendre rdv chez son vétérinaire pour éliminer ou traiter les raisons médicales
- Ramasser les crottes de son chien sans tarder, vérifier régulièrement les lieux d’élimination avant de laisser son chien y accéder.
Doubler les efforts de ramassage dans les foyers multi-chiens.
- Ne pas laisser son chien enfermé dans les petits espaces au-delà du « raisonnable », une durée adaptée à chaque individu.
Encourager et habituer le chien à éliminer avant de le confiner.
Laisser à disposition, des occupations, comme des puzzles de nourritures, lors des périodes de confinement, afin d’éviter l’ennui.
- Lors des balades, scanner le sol pour détecter les excréments plus vite que son chien, afin de pouvoir contourner la crotte ou de guider son chien dans une autre direction.
Eviter les endroits à haute concentration d’excréments (ex. certains parcs à chiens).
Si le chien n’a pas l’habitude de manger des crottes, ne pas exagérer nos comportements d’évitement. Quand les chiens reniflent les crottes, la plupart s’en détourne après les avoir reniflées.
- Enseigner, améliorer et entretenir les comportements liés aux signaux « viens » et « donne », ou leurs équivalents.
Pour maintenir à niveau ou améliorer un comportement, la conséquence, ce qui suit le comportement, doit valoir la peine pour le chien !
- Rendre inaccessible les excréments des autres espèces. Ex. ranger la litière du chat à un endroit, inaccessible pour le chien.
1 Les lapins et les rats recyclent au moins 40% de leurs excréments. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0271531782800158?via%3Dihub
2 The paradox of canine conspecific coprophagy : https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/vms3.92
l’étude a été basée sur 2 sondages. Le premier comparait les différences entre les chiens coprophages et les chiens non-coprophages et concernait 1552 réponses. Le deuxième avec 1475 réponses concernait les chiens coprophages afin de récolter des informations en relation avec la coprophagie et le succès des traitements.
3 https://library.wur.nl/WebQuery/wurpubs/fulltext/43992
4 Les propriétaires des 517 chiens faisant partie de l’étude, considéraient que leur chien avait un problème de comportement et ils ont pour cette raison, cherché de l’aide thérapeutique. Uniquement pour 2 chiens le problème annoncé était la coprophagie.
5 La coprophagie en élevage canin. Etiologie et traitements. Thèse pour le doctorat vétérinaire, présentée par Gabrielle LAIRIE. http://theses.vet-alfort.fr/telecharger.php?id=1033 . p.21
6 https://www.akc.org/expert-advice/health/why-dogs-eat-poop/
7 https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/vms3.92
8 Commentaire de Prof. Dr. Ir Anton Beynen dans https://www.researchgate.net/publication/342657293_Beynen_AC_2020_Diet_and_canine_coprophagy
9 https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/vms3.92
10 http://research.rmu.ac.th/icsss2015/img/Anton.pdf
11 https://www.researchgate.net/publication/342657293_Beynen_AC_2020_Diet_and_canine_coprophagy
12 https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/016815919400548S?via%3Dihub
13 https://www.researchgate.net/publication/342657293_Beynen_AC_2020_Diet_and_canine_coprophagy
14 https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/10888705.2019.1571921
15 https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/vms3.92
16 https://www.akc.org/expert-advice/health/why-dogs-eat-poop/
17 https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/vms3.92
Réponses
Je possède un chien qui a toujours mangé ses excréments ainsi que ceux des autres animaux. J’ai cherché, en vain, une solution sur internet et chez les vétérinaires. Ce chien a maintenant 12 ans et j’ai ENFIN trouvé LA solution ! Elle fonctionne immédiatement … Je lui donne des morceaux de courgette crue avec la peau. Il adore ça et ne mange plus du tout d’excrément.
Je viens d’acquérire une petite femelle miniature chihuahuas. J’ai beaucoup de problèmes de confiance. Depuis sont arrivés à la maison il est craintive des mains et des pieds. Comment je peux faire pour rendre ma petite moins craintive des géant humains que nous sommes?
Bonjour Christine. Merci pour votre commentaire.
Nous proposons deux cours sur la plateforme Muzo+ qui pouraient vous aider à comprendre et à modifier le comportement craintif de votre chihuahuas; il s’agit de “Analyse et Modification comportementale” https://muzoplus.fr/produit/sessions-cours/analyse-et-modification-comportementale-mars-2025/ et “face à l’environnement” https://muzoplus.fr/produit/sessions-cours/face-a-lenvironnement-aider-les-chiens-reactifs-agressifs-phobiques-mai-2025/